Pour réaliser un film autour du printemps arabe, Nouri Bouzid était un candidat idéal. Voilà près de trente ans que ce pilier du cinéma tunisien est en lutte — il a fait de la prison, jadis — contre toutes les formes d’oppression, de carcans culturels et sociaux. Il choisit, ici, pour héroïnes, deux femmes, différentes mais proches. Aïcha porte le voile, Zaineb, pas. Toutes deux travaillent dans une pâtisserie, à Tunis.

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Chez elle, Aïcha s’occupe de ses jeunes soeurs, fait la cuisine. Zaineb, elle, vit encore chez ses parents, voudrait travailler dans la mode et a un compagnon entrepreneur. Elles sont à un tournant de leur existence, à l’image du pays en ébullition. Dehors, des barrages sont improvisés dans les rues, des manifestations se déroulent un peu partout, la confusion règne.
Mais c’est sous l’angle intimiste que le réalisateur choisit de filmer la révolution. En insistant sur les relations — tendues ou harmonieuses, c’est selon — de ses héroïnes avec leur entourage. Tandis que le patron d’Aïcha la pousse à s’affranchir, à quitter le voile, la famille de Zaineb fait pression pour qu’elle le porte : séquence forte de rituel forcé, proche du viol, où la jeune femme, droguée, se débat contre la pose de ce voile, puis lâche prise.
A travers ces deux femmes, le réalisateur filme leur combat quotidien pour fuir l’obscurantisme, les compromissions, gagner leur indépendance. Vivifiant, disert, son film mêle paroles, chants, danses, allie la légèreté à la gravité. C’est parfois démonstratif, mais l’énergie et le courage — Nouri Bouzid n’hésite pas à critiquer le fondamentalisme religieux — l’emportent. Et l’image, sensuelle et libre, qu’il renvoie des femmes n’est pas si fréquente.

 

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